Projet 3629
montreal
12 août 2020L’acquisition du 3629 situé sur la rue Sainte-Catherine E. et sa rénovation en vue d’y (re)loger des personnes en situation de « désaffiliation sociale » constitue une réponse directe aux besoins spécifiques du secteur sud-ouest du quartier Hochelaga. Ces personnes qui ne correspondent pas au profil des locataires accueillis dans le logement social typique (Accès logis, volet III1 ) sont parmi les plus vulnérables du quartier. Plusieurs d’entre elles sont à risque de surdose, de vivre des situations de violence et d’isolement, particulièrement en contexte d’utilisation de drogue par injection ou inhalation (UDII) et de travail du sexe. Le projet du 3629 a été pensé dans une démarche concertée avec les organismes communautaires et les instances locales. Cette démarche, piloté par L’Anonyme, est possible grâce à la collaboration de partenaires communautaires tels que Dopamine, et d’experts dans le domaine de l’habitation et du développement de logements sociaux, tel que le Groupe de ressources techniques Bâtir son quartier, dans le but d’offrir 14 chambres aux personnes en situation d’instabilité résidentielle. L’implantation du 3629 s’appuie sur les approches par « réduction des méfaits » et de « bas seuil » dans la volonté d’abaisser les barrières d’accès et les conditions d’entrée et de maintien au logement pour ces personnes. Avec ces approches, l’idée n’est pas d’exiger d’elles des changements de comportement, mais bien de leur donner la possibilité de retrouver une certaine dignité et de répondre au besoin de base de se loger. Un cadre trop restrictif ne ferait que reproduire les conditions actuelles du logement social et viendrait les exclure. En plus de compléter l’offre de logement social, le 3629 répond concrètement au problème de fermeture des maisons de chambres de la rue SainteCatherine E. et l’enjeu de relocalisation des personnes qui y résidaient. Ces réponses prennent elles-mêmes naissance dans un contexte de gentrification du quartier Hochelaga, la transformation des espaces publics, une requalification du secteur sudouest et une refonte de la vocation de la rue Sainte-Catherine E. avec l’arrivée notamment d’un important projet immobilier à proximité du 3629.
Source : Illustration_3D_Bâtiment_3629_Mars2020_CBArchitecte.
Il est impératif de documenter la stratégie d’implantation du 3629, celui-ci étant le tout premier projet de la sorte à Montréal, et d’en produire des analyses visant à rendre compte de son acceptabilité sociale dans le quartier Hochelaga et la façon dont il répond aux enjeux de fragmentation sociale. Ce premier volet de la recherche est suivi d’une collecte de données auprès des locataires à leur arrivée afin de mieux comprendre l’évolution de leurs usages à l’intérieur de leur nouveau milieu de vie. (Co)habiter le 3629, c’est aussi voir la naissance des formes de solidarité entre les locataires et l’apparition graduelle de pairs-aidants. Ce deuxième volet sera particulièrement travaillé par la chercheuse Jacinthe Rivard et son équipe.
Le troisième volet du projet correspond aux dimensions du vivre ensemble aux abords de la rue Sainte-Catherine Est et dans les espaces publics du quartier plus largement. Ce troisième volet mettra en tension le caractère réellement public des espaces urbains du quartier et les rapports de coexistence des personnes qui les fréquentent, en évitant de réduire ces derniers à l’indifférence et au côtoiement. Il sera plutôt question de remonter aux usagers des espaces publics du quartier et à proximité du 3629 à partir d’une lecture dynamique de ce que ces personnes y font concrètement, dans leurs rapports mutuels. Au final, l’expérience du 3629 permettra de réfléchir dans les termes « d’apprêter » et « d’équiper le vivre-ensemble » 2 . Des publications scientifiques et des conférences dans des colloques sont prévues ainsi que la parution d’un livre à la fin du projet dans l’objectif de présenter le projet du 3629 dans d’autres milieux répartis à travers le Québec et le Canada.
Source : Illustration_3D_Bâtiment_3629_Mars2020_CBArchitecte.
De la transgression à une politique de l’hospitalité – Arrimage avec TryMontréal
Le 3629 a pour volonté d’assurer à la fois adaptabilité et flexibilité afin d’offrir des possibilités d’amélioration de la qualité de vie par le biais d’actions de proximité, en respectant le rythme des personnes qui y résideront. Il semble prudent de ne pas perdre de vue que son caractère novateur tient par ailleurs à sa capacité à faire « bouger les lignes » en terme d’une politique de l’hospitalité des milieux de vie alternatifs vis-à-vis les personnes les plus fragiles qui ne répondent pas aux exigences de l’hébergement d’urgence (ex. ne pas avoir d’animaux de compagnie, être sobre, etc.) ou aux critères d’accès au logement social (ex. n’avoir aucune dette avec l’Office municipale d’habitation de Montréal (OMHM) ou avec l’aide sociale).
En plus d’être transversale aux autres études de cas du partenariat TRYSPACES, la recherche mettra en relation l’innovation qui découle du projet 3629 et les conditions de vie des personnes qui le fréquenteront et y éliront domicile. Ce trait d’union, également marqué par la relation avec l’extérieur – le voisinage -, sera discuté en terme d’apparition dans l’espace public et son hospitalité vis-à-vis les locataires du 3629. Cette recherche vise enfin à produire de nouvelles questions d’une politique de l’hospitalité, en s’appuyant sur l’expérience du 3629 et les recommandations qui pourront être adressées à l’attention des décideurs publics à partir des avis formulés conjointement par L’Anonyme et les partenaires académiques.
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